5 décembre 2024

Jacques Martini

Hommage à Jacques Martini par Michel Raimbault.
Jeudi 31 octobre 2024

Jacques Martini, un grand chercheur nous a quittés.
Jacques a été membre de notre association Patrimoine pendant plusieurs années. Il nous a fait partager ses nombreuses connaissances de géologue et de spéléologue en organisant des sorties, en donnant des conférences, en rédigeant un article dans notre livre De la Dent de Rez aux Gorges de l’Ardèche.

18 février 2012

Avant de se retirer à Saint-Remèze, Jacques a passé une grande partie de sa carrière comme géologue en Afrique du Sud, se rendant aussi en Namibie et en Australie, où il peut voir des grottes au développement considérable, sans pareil en Europe (Boudila). Il était rattaché à l’Université de Genève et membre de la Société Suisse de Spéléologie.

Il a surtout travaillé dans les mines et dans les grottes à remplissage paléokarstique.
On lui doit des dizaines d’articles dans des revues scientifiques de renom, en particulier dans Karstologia pour les revue en français.

18 février 2012

Une fois à Saint-Remèze, Jacques se consacre aux paléo-karsts des environs de Saint-Remèze. Il faut dire que le plateau de Saint-Remèze est un vrai gruyère karstique avec sa multitude d’avens et de grottes, un paradis pour les spéléos. Le plateau devient son nouveau terrain.


Au début des années 2000, sous nos pieds, il va mettre en évidence une rivière souterraine fossilisée sur plus de 5 km, une rivière sans doute alimentée par des pertes de l’Ardèche alors qu’elle coulait 300 m plus haut qu’aujourd’hui, il y a près de 6 millions d’années, avant la fameuse crise de salinité messinienne. Une découverte exceptionnelle que cette rivière souterraine de Saint-Remèze !

18 février 2012

Jacques s’appuie sur la nature des remplissages, des limons, des sables micacés, des argiles, des graviers, des galets provenant des Cévennes et du plateau des Coirons, des micromammifères.

Son travail consiste à arpenter le terrain, à courir la garrigue et les sous-bois (au Cros de l’Aiguizier, à Costes Chaudes, Malbosc, Marzal), à rechercher en surface les indices potentiels (galeries décapitées, blocs calcités, concrétions, brèche…), à faire des sondages (Rounal), des prélèvements, à examiner les sédiments à la binoculaire, le matériel paléontologique (vertèbres, dents de rongeurs par exemple…), à échanger avec les laboratoires, à cartographier. Sur le terrain, ces tronçons de galerie fossile « ruinée », effondrée, avaient déjà été repérés par les paysans des temps passés, qui les avaient mis en culture profitant de sols plus propices… La découverte du réseau souterrain de la Bartade dans les Bois de Malbosc par Baba devait appuyer ton hypothèse. On avait là une galerie encore en place que l’on pouvait suivre sur plus de 400 de long, un canyon d’une hauteur d’environ 15 m sur 20 m de large s’intégrant parfaitement dans la rivière souterraine révélée par Jacques.

Je me rappelle être allé avec toi faire des prélèvements dans la partie profonde de la Bartade, pas très fier pour ma part car le tronçon était sérieusement gazé, mais toi tout à l’aise comme un blaireau sous terre, ou plutôt une fouine, récupérant des échantillons de sédiments vite mis en sachets.

C’était la confirmation de ta théorie sur la rivière souterraine de Saint-Remèze qui allait faire beaucoup de bruit dans le milieu spéléo et karstologique.
Je pense à Ludovic Mocochain, à Stéphane Jaillet, à Jean-Yves Bigot, qui vont avoir de nouveaux regards sur la genèse et l’enfoncement de l’Ardèche.
Étonnamment, tu n’as pas été intégré dans l’équipe scientifique de Chauvet ?
Jacques s’est aussi intéressé à la grotte de La Madeleine, tu vas la topographier, une tache bien difficile, ces deux grottes – l’Obscure et la Madeleine – étant tout en verticalité, tu te penches sur leur évolution, leur formation. Pendant longtemps, le panneau explicatif à l’entrée de la grotte était de toi.

On te voit aussi roder aux Arredons, autour de l’Aven du Cade, à rechercher une issue pour les hommes néolithiques qui l’ont occupé, ou encore à crapahuter sur la crête des Costes autour de cette fameuse ammonite déroulée… à la recherche de vestiges dinosauriens.
Jacques était vraiment le modèle du scientifique, très actif, homme de terrain et de bureau, d’une très grande intégrité intellectuelle, curieux, méticuleux, analytique, précis, dans sa bulle certes, mais faisant partager volontiers ses idées, appuyant volontiers ses convictions par des schémas accessible à tous.

Puis le temps a eu raison de toi, dans ta tour d’ivoire, tout s’est éteint progressivement.
On ne t’oubliera pas Jacques, tu as fait beaucoup pour notre territoire, pour la science. Merci.
Toute ma sympathie à Claire, à partager avec tes enfants.

 

Pour lire la publication de Jean-Yves Bigot, cliquez sur le lien : Imaginer … la paléo-rivière souterraine de Saint-Remèze (document PDF).

Jacques Martini le 5 novembre 2004 indiquant des remplissages indurés adhérant à la paroi de la paléo-cavité de Saint-Remèze.

Tiré de la publication de Jean-Yves BIGOT, 2010 : Imaginer… la paléo-rivière souterraine de Saint-Remèze (Ardèche).